Les expos mode de 2024
(Photo d'ouverture : Iris Van Herpen, détail © E.L. pour Brunette)
Être coiffeur, aujourd’hui comme hier, c’est un artisanat et un savoir-faire, mais cela implique également une culture mode et beauté plus large… Alors pour tous les professionnels, comme pour leurs client(e)s et les esthètes en général, voici ma sélection des plus belles expos en cours ou à venir, à Paris… et ailleurs !
A PARIS
Première et magnifique rétrospective de la créatrice de mode néerlandaise qui n’a lancé sa Maison de couture qu’en 2007 - et qui est aujourd’hui l’une des plus visionnaires de sa génération. Iris Van Herpen se passionne très tôt pour le monde du vivant et la danse classique. Grâce à son exceptionnelle ouverture d’esprit, ses connaissances pointues en sciences naturelles et sa créativité hors-norme, elle transgresse les codes du vêtement, en s’ouvrant tout autant aux savoir-faire traditionnels qu’aux nouvelles technologies.
Iris Van Herpen, détail © E.L. pour Brunette
Ses pièces de haute couture sont de véritables œuvres d’art, notamment inspirées par l’eau (à l’état solide, liquide, gazeux…), le monde sous-marin, les formes organiques, l’anatomie du corps humain, les états modifiés de conscience… Des petits bijoux qui dialoguent avec des œuvres d’art contemporain, à travers une ambiance sonore et une scénographie sombres et mystérieuses.
Alaïa / Grès. Au-delà de la mode.
Sculpteurs de formation tous les deux, Madame Grès (1903-1993) et Azzedine Alaïa (1935-2017) avaient de nombreux points communs dans leur façon de créer. Si rien n’atteste qu’ils se sont croisés, « leurs créations se sont rencontrées à n’en point douter », affirme la Fondation.
© Stéphane Ait Ouarab
Apôtres d’une certaine forme de dépouillement, les créations de Grès ou d’Alaïa, d’une apparente simplicité, dissimulent une complexité extrême de coupe et de conception. Guidés par le tissu, absorbés pendant des semaines par le choix d’un volume, partisans des couleurs monochromes, du noir intense et du blanc plâtre, les deux couturiers se rejoignent fortement dans l’esprit d’épure, d’intensité et de rigueur de la coupe.
Les drapés que Grès avait érigés en art total depuis les années 1930 se reflètent ainsi dans les robes longues, fluides et plissées d’Alaïa. « Dès que l’on a trouvé quelque chose de caractère personnel et unique, avouait Madame Grès, il faut l’exploiter à fond et en poursuivre la réalisation sans s’arrêter et jusqu’au bout ». À cela, Alaïa répondait des années plus tard : « Lorsqu’une idée s’impose à soi, il faut s’en saisir au lasso, tourner autour et ne pas en déroger ». Un dialogue réjouissant et une redécouverte indispensable de ces deux créateurs singuliers.
Yves Saint Laurent : Transparences. Le pouvoir des matières.
Cette exposition est le deuxième chapitre d’un récit entamé l’été dernier à la Cité de la dentelle et de la mode de Calais. Pour ce second volet le musée parisien porte son regard sur la transparence comme expression artistique privilégiée d’Yves Saint Laurent. La transparence, lorsqu’elle est portée, est rarement intégrale : elle est, en théorie, incompatible avec la fonction même du vêtement, qui est censé habiller le corps, le dissimuler ou le protéger.
© D.R.
Attiré par cette contradiction, et par la puissance suggestive de la transparence, Yves Saint Laurent s’empare, dès les années 1960, des matières comme la mousseline, la dentelle, ou le tulle. Telle un leitmotiv, la transparence revient régulièrement, pendant ses quarante années de création, parfois associée à des broderies ou des tissus opaques. Avec audace, il réconcilie les antagonismes et permet aux femmes d’affirmer leur corps non sans fierté et insolence, avec des pièces devenues iconiques.
« Les transparences, je les connais depuis longtemps. L’important, avec elles, c’est de garder le mystère…. Je pense avoir fait le maximum pour l’émancipation des femmes. J’ai créé des vêtements qui entrent tout à fait à leur aise dans le XXIème siècle ». Des oeuvres d’artistes modernes et contemporains font écho aux recherches du couturier français.
Paolo Roversi
L’exposition Paolo Roversi dévoilera 50 ans de photographies, et comment l’artiste s’est emparé de la mode pour créer une œuvre unique. D’origine italienne, Paolo Roversi s’installe à Paris en 1973. Depuis, il travaille pour des magazines prestigieux (Vogue italien et français, Egoïste, Luncheon…). Sa carrière est marquée par sa collaboration avec les plus grands créateurs de mode, notamment Yohji Yamamoto, Romeo Gigli, Rei Kawakubo pour Comme des Garçons.
Molly, Chanel, Vogue Italia, Paris, 2015 © Paolo Roversi
Dès ses années d’apprentissage, le choix du studio, de la chambre grand format et du Polaroid, définissent la manière de travailler et l’esthétique du photographe qui s’adapte au numérique avec succès. Sa signature est reconnaissable entre toutes : tonalités douces et sépia des noir et blanc à la lumière du jour, densité et profondeur des couleurs à la lumière de la lampe torche. Au fil des années, Paolo Roversi invente son propre langage photographique, accueillant les hasards et les accidents comme des opportunités de se renouveler.
Les plus grands mannequins sont passés devant son objectif. Elles posent toujours avec simplicité; leur présence est intense. Chacune de ses photographies de mode est un portrait. Paolo Roversi se tient à la fois au coeur du système et à distance, loin des courants éphémères de la mode. À la recherche de la beauté, il construit une oeuvre singulière sur laquelle le temps n’a pas prise.
A LONDRES
Plusieurs expos à voir au V&A Museum South Kensington. Cromwell Road.
C’est la première exposition consacrée à la couturière française au Royaume-Uni. Une expo déjà passée par Paris en 2021, et qui retrace l’histoire de cette Maison mythique, de sa création à ses évolutions les plus récentes, sous la férule de Karl Lagerfeld en « gardien du temple », notamment. Un coup de projecteur sur un style précurseur et farouchement moderne, qui continue d’influencer la façon dont les femmes s’habillent aujourd’hui.
Gabrielle Chanel, 1937, Paris © Roger Schall/Condé Nast/Shutterstock
L’exposition célèbre le pouvoir et la créativité des artistes cultes. Elle permet d’explorer et de redéfinir le profil initial d’une « diva », une notion qui a largement été détournée ou revue au fil du temps, dans l’imaginaire collectif, pour s’associer à l’opéra, bien sûr, mais aussi à la scène en général, à la musique populaire, puis pop, ainsi qu’au cinéma. Nos artistes les plus célèbres, talentueux, exubérants et durables sont ainsi devenus des divas…
Cher, Elton John et Diana Ross, 1975. © Mark Sullivan / Contour by Getty Images
Une expo inédite, qui explore la carrière exceptionnelle de la mannequin star et « supermodel » des années 90 Naomi Campbell. A travers le travail des plus grands couturiers et photographes, le musée revient aussi sur ses collaborations en termes de création, comme sur ses engagements et son impact culturel. Une première !
© D.R. / V&A South Kensington
A NEW YORK
The Costume Institute, la branche du Met dédiée à la mode, consacre entièrement son exposition aux créatrices et couturières femmes du début du XXème siècle à nos jours. Objectif affiché, évidemment : revenir sur l’indéniable apport des femmes dans une industrie souvent largement dominée et incarnée par des hommes - pour la partie créative, tout du moins.
© The Metropolitan Museum of Art Photograph by James J. Kriegsmann
Et remettre en lumière des couturières oubliées, ou simplement « invisibilisées ». Celles-ci côtoient donc les figures bien connues de Coco Chanel, Elsa Schiaparelli, Madeleine Vionnet, Jeanne Lanvin et, plus récemment, Vivienne Westwood, Rei Kawakubo pour Comme des Garçons, Miuccia Prada ou encore Iris Van Herpen. Une lignée de créatrices engagées dans la modernité, depuis les années 20, à (re)découvrir absolument… si vous passez par New York !