Les coiffeurs face au coronavirus
Alors que la France est désormais officiellement confinée, mais que tous les commerces « non essentiels » sont fermés depuis samedi minuit (restaurants, bars, boutiques diverses et, bien sûr, salons de coiffure), l’heure est grave pour toutes les entreprises françaises, et en particulier pour les PME (4 millions de petites et moyennes entreprises qui emploient 6 millions de personnes) et pour les TPE.
Le confinement du pays, rendu obligatoire par l’évolution de la pandémie et, malheureusement, par l’absence de sens des responsabilités d’une partie de la population, est censé durer deux semaines. Mais il y a fort à parier qu’il durera plus. D’une crise sanitaire majeure, nous allons donc passer, contraints et forcés par des impératifs de santé publique, à une crise économique. En respectant strictement, tous, les consignes de confinement et ce, quelle que soit sa durée, faisons au moins en sorte que les dégâts majeurs annoncés pour l’économie française, et au quotidien pour des familles, des individus qui seront inévitablement fragilisés, servent à quelque chose, et surtout à freiner l’évolution du virus.
Des mesures pour soutenir les entreprises
Pour soutenir les entreprises françaises, le gouvernement a décidé de débloquer 300 milliards d’euros (pour garantir les prêts sollicités par les entreprises auprès de leurs banques)
Globalement, l’idée est d’alléger et de différer un maximum de charges pesant sur elles. Les mesures générales détaillées sur le site economie.gouv.fr :
- des délais de paiement d’échéances sociales et/ou fiscales (Urssaf, impôts)
- dans les situations les plus difficiles, des remises d’impôts directs
- un soutien de l’État et de la Banque de France (médiation du crédit) pour négocier avec sa banque un rééchelonnement des crédits bancaires
- la mobilisation de Bpifrance pour garantir des lignes de trésorerie bancaires dont les entreprises pourraient avoir besoin à cause de l’épidémie
- le maintien de l’emploi dans les entreprises par le dispositif de chômage partiel simplifié et renforcé
- l’appui au traitement d’un conflit avec des clients ou fournisseurs par le Médiateur des entreprises
© Ouest France
La question des travailleurs non salariés
Concrètement, ce qui est à retenir pour les PME et les entreprises de coiffure :
- la suspension de tous les prélèvements sociaux
- le report de 6 mois de toutes les échéances bancaires
- la prise en charge du chômage partiel par l’Etat sur la totalité du salaire dès lors que l’entreprise a fait la démarche sur la plateforme dédiée. Cependant, l’avance sera faite par l’employeur qui peut demander de l’aide à sa banque, puisqu’il s’agit d’une créance d’Etat
- Un revenu pour les travailleurs indépendants serait accordé à hauteur de 1.500 euros/mois, dont, à cette heure, toutes les modalités ne sont pas encore connues (cela bénéficiera-t-il aux micro-entrepreneurs ?)
Sachant que, pour rappel :
- Dans le secteur de la coiffure, 55% des établissements n’emploient aucun salarié (39,7% des salons et 98,5% des activités à domicile)*.
- Qu’avec le boom des micro-entrepreneurs et de la coiffure à domicile, depuis les années 2000, celle-ci représente désormais 26% du nombre des établissements (environ 22 000 sur environ 85 000)*. Et qu’il s’agit évidemment de toutes petites structures.
- Que concernant la grande majorité des établissements (90% des établissements de coiffure sont des indépendants)*, ayant des salariés ou non, le patron, lui, n’est bien souvent pas salarié et pas couvert par le chômage.
- La vraie question, crue et cruciale, est donc celle de la rémunération des patrons artisans. Lesquels devront en outre avancer à l’Etat les rémunérations de chômage partiel…
Report des charges ou annulation pure et simple ?
Le gel ou report de la majorité des charges fixes, impôts, emprunts est bien évidemment une bonne chose. Mais toutes ces entreprises n’ayant plus aucune perspective en termes de chiffre d’affaires, et le plus souvent des trésoreries tendues, la grande interrogation reste la suivante : combien de temps pourront tenir les coiffeurs sans revenus ? Parmi eux, des voix s’élèvent d’ores et déjà pour demander « une annulation pure et simple des charges fiscales et sociales exigibles jusqu’au terme de la crise », puisqu’évidemment ces entreprises n’ayant plus de rentrées d’argent, le report des charges, qui vont dès lors s’accumuler, ne fera que différer d’éventuelles faillites.
Solidarité inter-entreprises
On parle beaucoup de solidarité nationale au sujet des mesures élémentaires de précaution à prendre pour freiner le développement du coronavirus (distance d’1 mètre, pas de contact physique, lavage régulier des mains, évidemment le moins de sorties possibles et isolement des personnes âgées et/ou fragiles).
Mais il faudra aussi très vite parler de solidarité économique et financière. Certaines entreprises du secteur ont commencé à jouer le jeu, en accordant des remises ou la gratuité de services pendant une durée donnée à leurs clients coiffeurs. Les grandes entreprises en bonne santé, en général, devraient aussi désormais faire preuve d’empathie en payant au plus vite leurs factures aux plus petites entreprises, pour leur offrir une trésorerie dont elles ont cruellement besoin aujourd’hui.
On note aussi des initiatives particulièrement inspirées et généreuses, comme celle du groupe Eugène Perma, de maintenir l’activité de son usine de Reims pour fournir aux hôpitaux des gels hydro-alcooliques, tout comme Sublimo avec son usine près de Périgueux, ou encore L'Oréal. LVMH l’a fait fait aussi, pour fournir les 39 hôpitaux de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP).
En ces temps difficiles, toutes les initiatives de solidarité sont les bienvenues, j’en reparlerai probablement.
D’ici là prenez-soin de vous et de vos proches, soyez raisonnables et responsables. En France, le bilan s’élève aujourd’hui mardi 17 mars à 148 décès pour 6 633 cas recensés (et vraisemblablement bien plus, puisque seuls sont pris en compte les malades officiellement testés positifs). Et le nombre de cas double tous les 3 jours.
En Italie, où on compte environ 28 000 cas (pour plus de 2 000 décès), on n'a pas encore atteint le pic de contagion, comme l’a rappelé le Premier ministre. Deuxième pays le plus touché d'Europe, l'Espagne (9 191 cas dont 309 morts) a enregistré près de 1 500 nouveaux cas en 24 heures et le gouvernement a prévenu que le confinement de la population risquait de durer.
© D.R.
Il ne tient qu’à nous de faire que cette période de grande difficulté sur le plan économique, avec probablement des conséquences graves pour un certain nombre d’entreprises, serve au moins à sécuriser le pays sur un plan sanitaire.
N’hésitez pas à vous tourner vers vos organisations syndicales (Unec, Cnec…) ou la Chambre des métiers pour plus de précisions.
Le référent unique des CCI et CMA :
CCI France entreprises-coronavirus@ccifrance.fr – tél. : 01 44 45 38 62
CMA France InfoCovid19@cma-france.fr – tél. : 01 44 43 43 85
*Source : Unec